«Jeudi noir» au Tchad: 259 personnes libérées de prison après avoir été graciées

Au Tchad, quelque 259 hommes, essentiellement des jeunes, sont sortis de prison samedi 8 avril. Ils avaient été graciés par le chef de l'État, Mahamat Déby, le 27 mars dernier.

 

Graciés il y a deux semaines, les voilà désormais libres. Les 259 hommes détenus pendant cinq mois se sont vus remettre au ministère de la Justice un « certificat de libération », rapporte l'Agence France-Presse.

Ils avaient été arrêtés le 20 octobre dernier, lors de cette journée de manifestation contre le pouvoir réprimée dans le sang, que les Tchadiens ont rebaptisée « Jeudi noir ». Puis, le 2 décembre, lors d'un procès de masse, organisé sans avocats ni médias indépendants dans la prison de Koro Toro, tous avaient été condamnés à des peines allant de deux à trois ans de prison ferme pour « attroupement non autorisé, destruction de biens, incendie volontaire, violences et voies de faits, coups et blessures volontaires et troubles à l'ordre public ».

C'est ce qu'a vécu ce jeune homme de 22 ans. Tous - sa famille, ses amis, ses voisins - sont assis au pied d’un arbre et écoutent avec attention son récit, raconte notre correspondant à Ndjamena, Olivier Monodji. Il ne faisait pas partie des manifestants. Il a été arrêté le lendemain du « jeudi noir » alors qu’il se trouvait chez ses parents. En tout, il aura passé près de six mois en détention dont trois mois et demi dans le bagne de Koro Toro, dans le nord du pays. 

Succès Masra relativise la portée de ces libérations

De l'avis de plusieurs organisations de défense des droits humains, beaucoup de ces jeunes hommes étaient en fait des prisonniers d'opinion. C'est en tout cas l'avis de Mahamat Nour Ibédou, président de la Commission nationale des droits de l'homme du Tchad. Il salue ces grâces et libérations, mais appelle le chef de l'État à aller maintenant encore plus loin.

« Cette grâce présidentielle est vraiment tombée à point nommé dans le cadre de la mise en place d'une Transition apaisée. Nous avons besoin de ce genre d'actes qui est susceptible de décrisper le climat dans le cadre de cette Transition, estime-t-il. Cependant, nous avons toujours demandé au président de la Transition de continuer les efforts, en vue de faire revenir ceux qui sont encore en dehors du pays et qui sont encore mécontents, qui sont encore en exil. De les faire rentrer au bercail parce que nous avons, pour cette transition, besoin de tout le monde. Et donc, la Commission nationale des droits de l'homme est en train d'œuvrer pour que ces camarades rentrent au pays aussi ».

Cette vague de libérations est la deuxième de la semaine. Mercredi, 380 rebelles du Front pour l'alternance et la concorde au Tchad (FACT) avaient retrouvé la liberté après avoir également été graciés. Ils avaient été condamnés à la prison à vie, entre autres, pour le « meurtre » au front de l'ancien président Idriss Déby en 2021.

L’opposant Succès Masra tempère ces libérations, en particulier celles des manifestants. Sur son compte Twitter, il explique que leur seul crime est d’« avoir exigé la justice et l’égalité » et qu'« ils ne représentent même pas 25% des arrêtés et portés disparus dont nous exigeons toujours la libération ».

Selon les autorités, 139 personnes sont toujours emprisonnées, en attendant d'être jugées.


Vous avez aimé cet article ? Partagez-le ...

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre commentaire sera publié après validation.