Pour leur ultime débat, Donald Trump et Joe Biden restent courtois malgré les attaques

Les deux rivaux dans la course à la Maison Blanche se sont affrontés jeudi soir à Nashville lors d'un dernier duel télévisé, à 12 jours de la présidentielle américaine. Donald Trump et Joe Biden ne se sont quasiment pas coupé la parole, contrairement à leur premier débat chaotique à Cleveland. Cela n'a pas empêché des accusations bien préparées de part et d'autre.

 

"C'était le même contenu que la dernière fois, sauf que cette fois, on a compris ce qu’ils disaient." La journaliste de CNN Abby Phillip a parfaitement résumé la situation à l'issue de l'ultime débat présidentiel entre Donald Trump et Joe Biden, organisé le 22 octobre à Nashville, dans le Tennessee. Les deux prétendants à la Maison Blanche n'ont pas répété les mêmes erreurs que lors du premier débat qui les a opposés à Cleveland, durant lequel ils s'étaient livrés à une foire d'empoigne du début à la fin.

Cette fois, les règles étaient plus strictes, et cela a sûrement aidé à conserver un climat courtois durant une heure et demie. Les organisateurs avaient décidé de successivement couper les micros des candidats pendant les deux premières minutes de prise de parole de chacun. Résultat : ils ne se sont pas ou presque pas coupé la parole et ont pu davantage échanger sur le fond.

"Le président n'a pas de plan"

Cela n'a pas empêché les attaques, à douze jours de la présidentielle américaine. C'est Joe Biden qui a mené la première charge au sujet de la pandémie de coronavirus, responsable de plus de 222 000 décès dans le pays. "Quiconque responsable d'autant de morts ne devrait pas rester président des États-Unis", a déclaré le candidat démocrate. "Le président n'a pas de plan, il n'a toujours pas de plan", a-t-il poursuivi, en prédisant "un hiver sombre" aux Américains.

 

Donald Trump ne s'est pas démonté. Il a défendu sa gestion de la pandémie sur un ton optimiste, trois semaines après avoir été lui-même diagnostiqué positif au Covid-19. "Je suis immunisé, m'a-t-on dit, que ce soit pour quatre mois ou pour la vie", a-t-il continué. Le président américain a une nouvelle fois promis l'arrivée rapide d'un vaccin et accusé Joe Biden de vouloir reconfiner les États-Unis. Il a pris l'exemple de New York, devenue selon lui une "ville fantôme" à cause des restrictions sanitaires.

L'ombre du fils Biden

Alors que plus de 48 millions d'Américains ont déjà voté, le républicain est à la traîne de près de huit points dans les sondages nationaux. Ce débat était donc pour lui l'opportunité de remonter la pente. C'est pourquoi il avait hâte de passer à un autre sujet : celui des affaires d'Hunter Biden, le fils de l'ex-vice-président, avec l'Ukraine et la Chine. "Joe, je pense que vous devez une explication aux Américains", a commandé Donald Trump. Quelques minutes avant le débat, le camp républicain avait sorti de son sac ce qu'il espère être une des "surprises d'octobre" pouvant faire basculer une course présidentielle.

Un ex-associé de Hunter Biden, Tony Bobulinski, a donné une conférence de presse durant laquelle il a accusé le fils du candidat d'avoir utilisé son nom de famille pour gagner "des millions" à l'étranger, avec la bénédiction de son père. Tony Bobulinski a ensuite été invité à figurer parmi le public du débat. Donald Trump a jugé que son récit était "accablant". "N'essayez pas de vous présenter en bébé innocent !", a-t-il lancé à Joe Biden, qu'il a plus tard qualifié de "politicien corrompu".

Le candidat démocrate a vivement protesté : "Jamais de ma vie je n'ai pris un centime d'une source étrangère". Il a accusé le président de relayer des informations récoltées par son ami avocat Rudy Giuliani directement au près de Moscou. Reste que Joe Biden ne s'est pas attardé sur ce sujet que les médias américains prennent avec des pincettes.

Il a préféré retourner l'accusation, en reprochant au milliardaire d'avoir eu un compte en Chine et de n'avoir jamais publié ses déclarations d'impôts. "Que cachez-vous ?", a-t-il demandé. Reste à savoir si les Américains s'intéresseront de près à cette nouvelle affaire Hunter Biden, qui rappelle, par sa temporalité, celle des e-mails d'Hillary Clinton remise sur la table par le FBI à quelques jours du scrutin de 2016.

Santé, énergie, racisme

Sur le reste des sujets, les deux rivaux sont restés fidèles à leurs lignes directrices. Donald Trump, qui veut mettre fin à l'assurance santé appelé 'Obamacare', a par exemple accusé Joe Biden de vouloir une "médecine socialisée". "Il est un peu perdu, il croit qu'il affronte quelqu'un d'autre", s'est moqué Joe Biden, en rappelant qu'il a battu le candidat socialiste Bernie Sanders lors des primaires.

De la même manière, Donald Trump a accusé Joe Biden de vouloir se plier à l'agenda de la gauche antigaz et antipétrole de schiste, un sujet crucial, notamment dans les État clés de Pennsylvanie, de l'Ohio et du Texas. Mais le démocrate a répété qu'il n'interdirait pas la fracturation hydraulique, en tout cas pas sur les terres fédérales. Il a toutefois affirmé qu'il se détournerait progressivement de l'industrie pétrolière. Une perche aussitôt saisie par Donald Trump, qui se présente comme le champion de l'indépendance énergétique du pays : "Vous vous rappellerez de ça, le Texas, l'Ohio, la Pennsylvanie ?"

Sur la question du racisme et des violences policières, le démocrate a reconnu que le "racisme institutionnel" existe bel et bien aux États-Unis. Pour y répondre, il faut selon lui "fournir des opportunités" aux jeunes Afro-américains. "Il a été au gouvernement, et il n'a rien fait", a rétorqué le républicain. "Personne n'a fait plus pour la communauté noire que Donald Trump", a-t-il poursuivi.

Faux pas

Y a-t-il eu un gagnant jeudi soir ? Il s'agit peut-être d'une gagnante, la modératrice Kristen Welker, journaliste de NBC News, qui a mené ce débat avec discrétion et efficacité. Mais les grands gagnants sont surtout les téléspectateurs, qui ont eu droit à 90 minutes d'échanges constructifs et respectueux.

Résultat, les deux candidats ont marqué des points. Donald Trump se devait d'apparaître plus présidentiel : il a rempli sa mission à force de patience et de discipline. Joe Biden, lui, devait conforter son avance dans les sondages : il a su parer les coups de son rival tout en se présentant comme le candidat de la réconciliation entre deux Amériques divisées.

Le démocrate a d'ailleurs repris une technique qui lui avait réussi lors du premier débat : regarder la caméra et s'adresser directement aux Américains pour leur montrer la qualité la plus mise en avant par son équipe, l'empathie. Mais il a commis un faux pas remarqué à la fin du débat en regardant sa montre, visiblement fatigué et pressé que la torture s'arrête. En 1992, George Bush père avait fait le même geste lors de son duel avec Bill Clinton. C'est ce dernier qui a fini par remporter la présidentielle.


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