Pakistan: la Cour suprême «invalide» l'arrestation d'Imran Khan

Après deux jours de manifestations violentes organisées par des partisans d'Imran Khan à travers tout le pays, l’armée a déployé, ce jeudi 11 mai, des militaires dans la capitale Islamabad. L’arrestation mardi de l’ex-Premier ministre, accusé de corruption, et son placement en détention provisoire ont fait sombrer le Pakistan dans le chaos. Fait rare : des soutiens d’Imran Khan s’en sont pris à des symboles du pouvoir militaire. Ce jeudi, Imran Khan a comparu devant la Cour suprême qui a jugé son arrestation « invalide ».

 

Le Pakistan est au bord de la guerre civile. Des postes de police, des véhicules de l’armée, la résidence du commandant militaire de Lahore ont été incendiés. Comment expliquer ce déchaînement de violences contre l’armée ?

« Les militaires ne veulent plus gouverner, mais ils veulent néanmoins diriger le pays à travers des civils. Et ces civils, ceux qu’ils soutiennent élections après élections, finissent par s’émanciper de la tutelle des militaires. Sauf qu’Imran Khan est très populaire, a des soutiens dans tout le pays, dans toutes les catégories de la société. Il résiste et il va être beaucoup plus difficile de réprimer ce qui ressemble de plus en plus à un soulèvement populaire, que ce que sans doute l’armée avait anticipé », explique Christophe Jaffrelot, chercheur au CERI (Centre de recherches internationales) de Sciences Po.

Autre point inédit : la popularité d’Imran Khan au sein même de l'appareil militaire. « Imran Khan est populaire aussi dans les rangs de l’armée. Et donc, on est dans une configuration vraiment très atypique, avec une armée sur la défensive, associée à certains civils des partis traditionnels, et puis le parti d’un homme, Imran Khan, soutenu par une large fraction de la population », poursuit Christophe Jaffrelot.

La puissante armée souhaite aussi garder la main sur des dossiers aussi importants que sont les relations avec l’Inde ou la Chine et l’arme nucléaire, ce qui bride énormément la marge de manœuvre des civils. Civils qui s’accommodent de moins en moins avec cette situation, d’autant que le pays est plongé dans une grave crise économique.

Après la décision de la Cour suprême, nouveau rendez-vous important vendredi pour Imran Khan

Arrêté mardi et placé mercredi en détention provisoire pour huit jours, Imran Khan a comparu ce jeudi devant la Cour suprême, après un recours déposé par ses avocats contre son arrestation. La juridiction a déclaré celle-ci « invalide ». « Votre arrestation est invalide et le processus entier doit être revu », a déclaré Umar Ata Bandial, le président de la Cour suprême.

« Cependant, Imran Khan reste détenu par la Cour suprême. Il va passer la nuit hébergé dans les bâtiments de l’instance et il devra se rendre demain à la Haute cour d’Islamabad pour clarifier sa situation dans l’affaire de corruption dans laquelle un mandat d’arrêt a été émis à son encontre », explique Sonia Ghezali, correspondante de RFI dans la capitale pakistanaise.

L’annonce de la Cour suprême a provoqué des scènes de liesse chez les militants du PTI (Mouvement du Pakistan pour la justice), rassemblés en fin de journée à quelques mètres de la Cour suprême, en plein cœur d’Islamabad.

La zone est quadrillée par des paramilitaires et l’accès à cette zone est impossible : plusieurs routes sont bloquées et des conteneurs ont été placés sur certains axes routiers et à l’entrée de la capitale. L'objectif est d'éviter les rassemblements de masse et les manifestations telles que celles qui ont secoué le pays depuis mardi, jour de l’arrestation d’Imran Khan. Le PTI appelle ce jeudi soir ses partisans à cesser de manifester.

Le calme devrait revenir au Pakistan après 48 heures d’émeutes et de chaos, sauf nouveau rebondissement vendredi. Plus d’une centaine de procédures judiciaires éclaboussent Imran Khan depuis qu’il a été évincé du pouvoir par une motion de défiance il y a plus d’un an.


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